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jeudi 25 Avr 2024
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Portrait du mois: Diélia Mbaye Sage-femme émérite et génie de la «délivrance» avec plus de 40 homonymes.

Diélia Mbaye Sall Sage-femme émérite et génie de la «délivrance», 33 ans de métiers, plus de 40 filles portent son prénom à Saint Louis.Elles sont des dizaines, des centaines et, sans risque d’en abuser, des milliers de parturientes qu’elle a aidées à mettre au monde leurs enfants de ses mains douces, l’œuvre délicate, le geste dextre. Ces qualités ont fait de Diélia Sall la sage-femme la plus sollicitée de sa corporation à Saint-Louis. Son nom, connu de tous, a été déporté jusqu’au-delà de l’Atlantique par son expérience. De l’expérience, elle en a à revendre, car elle a pris le temps de se former, de consolider ses acquis et d’acquérir plus de connaissance pour aspirer poser les pieds sur d’autres paliers. Conquise par la joie de « donner la vie », elle a enrichi son savoir en multipliant les actions sur le terrain.
Nombreux sont ceux qui ne parviennent pas à mettre un visage sur son nom ou un nom sur son visage. D’une simplicité déconcertante, la dame, née dans le Fouta, passe presque inaperçue. Habillée d’un boubou wax sur lequel la couleur bleue règne en maitre, la dame de corpulence moyenne, de teint noir, de taille moyenne reçoit l’équipe de Lasignare.com avec un sourire avenant. Jouissant d’une forte popularité dans la région, Diélia est très sollicitée par les femmes de la cité qui refusent de lui accorder sa retraite. Malgré ses 70 berges.

Tout a commencé en 1969. Unique fille et seule lettrée de sa famille, Diélia suit les conseils de son oncle. Il lui fallait quitter les bancs du lycée pour soutenir sa famille aux revenus modestes. La jeune fille qui vit à Saint-Louis avec sa tante depuis l’age de deux ans se lance alors dans sa vocation, son aspiration : la santé. La jeune fille quitte le lycée John Fitzgerald Kennedy et intègre l’école des agents sanitaires de Saint-Louis en 1969 sur concours. Après trois années, elle boucle avec brio sa formation, le diplôme dans la blouse. Figurant parmi les 5 premiers de sa promotion, elle sera orientée à la section odontologie de l’université de Dakar. Elle passa une année sur les bancs des salles de cours et sort major de sa promotion. Qui peut faire mieux ? « J’ai commencé par le métier d’infirmier. Au début, ce n’était pas mon vœu, mais des circonstances m’ont poussé à intégrer l’école des agents sanitaires de Saint-Louis », confie-t-elle. 

Maitresse sage-femme à 33 ans 
Son ambition, jusque-là cachée, se révèle au grand jour. Dopée par ses compétences médicales, l’agent de santé se présente au concours direct d’entrée à l’école des sages-femmes. « Cela a toujours été mon rêve, être sage-femme ». Un rêve qui ne tardera pas à se réaliser. Fraichement sortie de l’école, elle sera affectée à la maternité du centre hospitalier régional de Saint-Louis en 1977. Mais elle ne commencera à exercer son métier qu’une année plus tard, en 1978. Cinq ans plus tard, elle reçoit la confiance du colonel Mamadou Diouf, alors directeur de l’hôpital, qui la nomme maitresse sage-femme de la maternité de Saint-Louis. Elle n’avait que 33 ans. Responsabilité qu’elle occupera jusqu’en 2000. 

Malgré les connaissances acquises des meilleurs agents de santé durant sa formation, Diélia Mbaye Sall a toujours refusé de dresser des barrières dans sa carrière, car pour elle, le savoir s’acquiert de jour en jour. Le côté humain, les compétences médicales requises et la joie de pouvoir mettre au monde des enfants l’ont poussé à braver les routes et les cieux pour être au top de son métier, sinon figurer parmi les meilleurs. « J’ai pu consolider mes expériences grâce aux échanges que j’ai eus avec des médecins coopérants et des gynécologues sénégalais », affirme-t-elle. Et c’est à cela qu’elle invite les plus jeunes. 

                      Une cinquantaine d’homonymes par reconnaissance
Après avoir consacré une trentaine d’années à la maternité, elle a réussi la quasi-totalité de ses accouchements. Du succès, Diélia en a bien eu dans son domaine. Selon elle, c’est la volonté divine si elle a eu la confiance et la reconnaissance de la population. Mais aussi, son amour pour le métier. « Sauver une vie, c’est la meilleure des choses, cela n’a pas de prix », note-t-elle. Sa disponibilité dans toutes les circonstances, son ouverture, son empathie, les femmes le lui ont bien rendu. Aujourd’hui, Diélia Mbaye compte une cinquantaine d’homonymes dans toute la région. Des gens avec qui elle n’a aucun lien de parenté, mais qui ont tout de même tenu à la remercier pour avoir sauvé la vie de leur bébé. Des souvenirs joyeux dans ce métier font légion. Elle en a eu de très beaux. La satisfaction morale après un accouchement réussi est incommensurable, confie-t-elle. « Quoi de plus beau que de sortir de la salle d’accouchement avec un bon résultat ? » Des souvenirs malheureux sont aussi épinglés dans le registre de sa carrière. Cela va de soi. « Il y a des hauts et des bas dans ce métier. Parfois, on perd la maman ou l’enfant. On recevait parfois des cas très compliqués, des femmes difficiles à sauver », précise-t-elle. Et lorsqu’elle perdait sa patiente ou son enfant, la blouse blanche était rongée par la tristesse, la déception. « Il m’arrivait même de pleurer, me sentant coupable de cette perte, malgré mes efforts ». Elle ressasse : « J’ai perdu une collègue que j’assistais à l’accouchement avec d’autres sages-femmes. Elle avait des complications. Elle attendait des jumeaux, après la naissance du premier, elle a perdu la vie avant l’arrivée du second. Elle avait perdu beaucoup de sang ». Triste souvenir.
Mère de sept enfants, Diélia Mbaye Sall a pu transmettre le virus à une de ses filles qui exerce aujourd’hui à la maternité de l’hôpital régional de Saint-Louis. Ses tentatives d’intéresser les autres à ce métier ont été vaines. 
La sage-femme dispense des cours de Puériculture et soins obstétricaux dans le privé. Certains de ses élèves la trouve stricte. Normal, car dit-elle « il ne faut pas tâtonner devant la vie humaine, ce travail exige une formation rigoureuse ». Ce qui l’a d’ailleurs poussé à abandonner l’accouchement. L’âge ayant grignoté ses capacités physique, Diélia estime que « si on ne sens plus apte à exercer ce métier, il faut passer le témoin aux jeunes ». 

Après sa retraite en 2010, la septuagénaire a ouvert un cabinet. Mais elle se limite à la consultance. La brave Diélia a fait son temps et les nombreuses sollicitations des femmes qui souhaitent qu’elle les assiste à l’accouchement, n’ont pas réussi à la faire changer d’avis. 
source:Lasignare

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