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mardi 23 Avr 2024
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Portrait du mois : Alpha Sy, Écrivain, philosophe : un penseur transdisciplinaire

Maître en philosophie, Alpha Amadou Sy a été professeur et formateur de 1981 à 2016. Son éloquence et son élégance résonnent comme une source d’inspiration pour les épris de culture.

En tant que président de la section sénégalaise de la Communauté africaine de culture (Cacsen) et Administrateur de la Saint-Louisienne de la culture et de la recherche (Scr), le Professeur Alpha Sy enseigne le monde à travers ses chefs-d’oeuvre qu’il a mis du temps à produire avec brio. C’est un auteur bien inspiré. Un écrivain qui se livre régulièrement à une méditation transcendentale, transdimentionnelle.
À travers des figures de style, il fait voler haut le verbe (pas toujours), tout en séduisant ce parterre d’intellectuels qui viennent d’horizons divers pour suivre religieusement son raisonnement discursif, son argumentaire.
Le Professeur Alpha Amadou Sy ne passe pas inaperçu dans la capitale du Nord, où il a l’habitude d’animer des conférences, des colloques, des séminaires, à l’Université Gaston Berger, à l’Institut français, dans les différents lycées et collèges du centre-ville. Il est sollicité constamment et de toutes parts pour des productions intellectuelles.
Ce qui est remarquable dans sa façon particulière de communiquer, c’est qu’il évite à tout prix de developer un langage ésotérique. Ses explications sont claires, limpides, enrichissantes et accessibles à tout le monde. Souvent, il a le souci de tenir compte du niveau d’études de ses admirateurs, pour se rabaisser à leur niveau, en vue de leur inculquer le savoir et les connaissances dont ces derniers ont besoin pour faire face aux affres de cette vie qui devient de plus en plus difficile. Ses techniques de communication s’articulent autour de la pédagogie et de l’andragogie (Science et pratique de l’éducation des adultes).
Auteur d’une quinzaine de livres
Il est né à Saint-Louis, ville qu’il n’a quittée que pour faire ses études à l’Université de Dakar et à l’Ecole normale supérieure. Ancien élève du lycée Charles de Gaulle, il est titulaire d’une maîtrise en Philosophie, d’un Cs en sociologie et d’un Certificat d’aptitude à l’enseignement secondaire.
Le Professeur Alpha Sy est auteur d’une quinzaine de livres qui se caractérisent par leur approche pluridisciplinaire. Il s’est évertué à écrire sur les expériences démocratiques en cours en Afrique, sur des questions esthétiques et anthropologiques.
Faute de savoir pourquoi résumer tel livre et pas un tel autre, il nous fait remarquer qu’il met à profit la théorie de la connaissance, considérée comme la matrice du mode de pensée philosophique. Cela, dit-il, pour questionner les discours et les pratiques des hommes. «La philosophie, qui a renoncé à ses visées hégémonistes, est assez outillée pour ce type d’investigation dont l’avantage est de nous mettre à l’abri de l’académisme. Celui-ci pèche par les frontières, parfois trop rigides, qu’elle instaure entre les différents continents du savoir», analyse l’écrivain.
Créer des espaces d’expression culturelle
Alpha Sy a toujours pensé qu’il ne suffisait pas d’écrire. Il est bon aussi de créer des espaces d’expression culturelle. Dans cet esprit, il a eu à diriger, pendant une bonne dizaine d’années, le comité de pilotage, sous l’égide du Cercle des écrivains et poètes de Saint-Louis, de la Fête internationale du livre de Saint-Louis et de son festival de poésie.
Depuis 2011, ses Doyens lui ont fait l’honneur de le porter à la présidence de la section sénégalaise de la Communauté africaine de culture qui a organisé, entre autres, des caravanes littéraires et colloques internationaux. Il a aussi engrangé une petite expérience, en tant qu’initiateur, avec l’Institut français de Saint-Louis, de café philo et de Nuit de la Philosophie.
Selon le Professeur Alpha Sy, la contribution de la philosophie peut être immense. «Ce contexte de la pandémie offre – malheureusement pas du tout alors à moindre frais – à ce monde de savoir un considérable champ de réflexion. Alors que l’un des slogans le mieux partagé était sans nul doute la santé pour tous à l’an 2000, voici que, depuis novembre 2019, un bien minuscule virus a fini de faire de l’intégralité du globe son terrible théâtre d’opération», observe-t-il.
Depuis au moins le Sommet de la terre, tenu à Rio en 1992, a-t-il poursuivi, les experts et écologistes n’ont cessé de mettre en garde contre les conséquences qui ne peuvent être que fâcheuses de l’exploitation, sur de vastes échelles des forêts, l’extermination des animaux sauvages et les actions perverses à la base de dérèglements climatiques.
Il a été dit et écrit que cette agression de la biodiversité engendre, dans le moyen ou long terme, une propagation de virus extrêmement dévastateurs.
Réflexion sur la Covid-19
En poursuivant avec lui la réflexion sur ce contexte de la Covid-19, il est bien inspiré par le slogan «Restez- chez vous !», précisant que la pertinence de cette question apparaît au grand jour quand on réalise que l’homme est fondamentalement en rapport avec l’autre qui est sa vérité. Dans des sociétés encore à forte tendance communautaire, c’est un acte des plus répréhensibles que de sommer l’autre à rester chez lui. Je ne reviendrai pas ici sur les conséquences politiques et idéologiques de son usage pour le Front national en France.
En revanche, a-t-il souligné, ce qui focalise notre attention est de voir comment, paradoxalement, rester chez soi, porter le masque et observer la distanciation physique sont devenus de remarquables modalités de déclinaison de l’amour et de l’affection.
C’est dans la mesure où ces recommandations – même dans le contexte de l’administration des vaccins – sont les moyens les plus efficaces de couper la transmission du virus, «que je me dis que mon propre comportement engage, de quelque manière, le destin des autres membres des communautés. Donc, c’est en décidant, en toute connaissance de cause, d’observer ces mesures- barrières que je me protège en protégeant les autres.
Philosophiquement, la question est ainsi formulée : comment «ponctionner» sur ma propre liberté afin de reprendre le jour d’après ma liberté, toute ma liberté ? Comment «ponctionner» sur ma propre liberté afin que les autres, dont la santé dépend, plus ou moins, de ma propre responsabilité, puissent échapper au virus afin qu’eux et moi nous puissions nous retrouver aussi heureux qu’auparavant.
Responsabilité individuelle et libertés collectives
Ainsi, de l’avis du Professeur, indéniablement, le contexte est des plus propices à la réflexion sur la responsabilité individuelle et les libertés collectives. «Restez chez vous», sous ce rapport, ne saurait en aucune façon, provoquer le scandale de la raison démocratique.
Toutefois, a-t-il ajouté, l’autre revers est que le confinement a soulevé d’autres contradictions dont : quel choix faire entre continuer de vaquer à ses occupations avec le risque de choper le virus et celui de mourir de faim faute de ne plus pouvoir gagner son pain ?
Dans le même esprit, comment trancher entre devoir éviter de courir le risque d’attraper le virus en ne se rendant plus à des funérailles et la mauvaise conscience pouvant résulter du sentiment d’avoir failli à un devoir des plus essentiels pour la communauté ; à savoir le «siggil ndigàale» (formule de condoléances) dans la forme, le contenu et au lieu qu’il faut. Il s’y ajoute que la Covid-19 est la cause d’une rupture anthropologique qui a pu faire frémir plus d’un : l’impossibilité d’accompagner ses morts selon des traditions et rites vieux de pratiquement plusieurs millénaires !

Profondes mutations de la société
La société, dans le monde, a tendance à subir constamment de profondes mutations sur tous les plans et à tous les niveaux, elle bouge, se transforme au fil du temps. Au regard de Alpha Sy, le mouvement est la vérité du monde. «Les humains sont en quête permanente d’évolution, mais tout progrès porte en lui-même ses propres contradictions. L’intelligence des contradictions qui structurent notre globe permet à l’homme d’avoir une pleine conscience de son devoir, mais surtout de savoir où poser le pied», avance l’écrivain. Il ne s’agit pas, selon lui, pour la philosophie de se substituer aux autres savoirs, ce n’est pas son ambition, encore moins ses prérogatives.
En revanche, argumente le professeur de philosophie, elle met à profit les acquis issus des investigations des hommes de sciences, des anthropologues, des économistes, des géographes pour alimenter une réflexion exhaustive à même de restituer à l’homme son unicité. «Et si comme le dit Jean Rostand, la science a fait de nous des Dieux avant que nous ne méritions d’être des hommes, il revient à la philosophie de donner à la science cette conscience sans laquelle, comme le prédisait Rabelais, elle ne serait que ruine de l’âme», souligne Sy.

Selon Abdoukhadre Diallo dit Papis, poète, l’écrivain et philosophe Alpha Sy est un penseur transdisciplinaire qui a su très tôt se départir du cloisonnement universitaire. C’est la raison pour laquelle il a pu produire une douzaine d’ouvrages sur des thématiques qui embrassent divers domaines de la science.
C’est un esprit fin, un grand esprit, un orateur magnétique qui sait séduire son auditoire de par son immense culture, sa maîtrise des concepts et des langues à travers lesquels, il les exprime, en y imprimant la pédagogie qui sied.
Un de ses traits de caractère, c’est la constance dans ses idées et sa fidélité en amitié.
Sur le plan social, pour ceux qui le côtoient, Alpha est d’une générosité sans borne.
C’est un humaniste qui met l’homme au centre de ses préoccupations. Il ambitionne toujours de fédérer les uns, les autres. Cependant, il est très exigeant dans sa relation avec le temps, autant pour lui, que vis-à-vis des autres. La préciosité du temps est une réalité sur laquelle il ne transige pas.
Le Directeur de la station régionale de Zik/Fm de Saint-Louis, Babacar Niang, journaliste et enseignant, fait partie des admirateurs du Pr Alpha Sy.
«Nous avons tous intérêt à suivre les conseils de ce philosophe émérite. C’est un rassembleur, un facilitateur, un artisan infatigable de la paix, qui œuvre pour l’amélioration des conditions de vie des populations», dit-il.
Un autre enseignant du nom de Cheih Bâ invite l’ensemble de nos concitoyens à méditer, à réfléchir sur les enseignements du Pr Alpha Sy. Celui-ci est considéré, partout où il passe comme un intellectuel modeste, accessible, serviable, prompt à transmettre son savoir à la société, de manière bénévole et désintéressée. Il fait partie des intellectuels qui font la fierté du Sénégal.

Source : Le Soleil

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